Le rôle de la société civile dans la planification de l’éducation : l’expérience du Zimbabwe
Evelyn Wadzanayi Chitiga, de la Coalition de l’éducation du Zimbabwe (ECOZI), est convaincue de l’importance d’impliquer la société civile dans la planification et la gestion de l’éducation. Cette participation garantit la transparence, l’appropriation, la durabilité et la redevabilité.
Ayant récemment suivi le cours en ligne de l’IIPE sur les bases de la planification de l’éducation en tant que bénéficiaire d’une subvention d’Éducation à voix haute (Education Out Loud, EOL), elle explique pourquoi la participation de la société civile est cruciale pour l’avenir du système éducatif zimbabwéen.
Pourquoi est-il important que les acteurs de la société civile du Zimbabwe participent à la planification et de la gestion de l’éducation ?
Les organisations de la société civile (OSC) jouent un rôle essentiel dans la protection des droits humains, notamment le droit à l’éducation garanti par la Constitution zimbabwéenne. Les OSC veillent à ce que des politiques soient mises en place pour que les écoles offrent un environnement d’apprentissage sûr et que le droit à une éducation inclusive et de qualité soit respecté. En outre, elles améliorent la redevabilité et la transparence en jouant un rôle d’observateur des politiques éducatives.
L’implication des OSC favorise un plus grand engagement des parties prenantes, permettant une compréhension globale des défis auxquels l’éducation est confrontée et facilitant la recherche de solutions holistiques. Par exemple, lors de la sécheresse de 2024, le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire a impliqué différentes parties prenantes, dont des ministères, pour s’assurer que les apprenants continuent d’aller à l’école et de recevoir des repas malgré les conditions.
Les OSC apportent également des connaissances spécialisées et une expertise en matière de planification et de gestion de l’éducation : les décideurs politiques peuvent bénéficier de leurs points de vue et de leurs recommandations, ce qui amène à faire des choix politiques plus éclairés et fondés sur des pratiques éprouvées.
Comment votre organisation contribue-t-elle à la planification de l’éducation au Zimbabwe ?
ECOZI collabore avec le gouvernement pour influencer la prise de décision, suivre les affectations budgétaires et superviser le déboursement et l’utilisation des fonds. Cette relation étroite favorise le retour d’information et l’utilisation efficace et transparente des ressources afin d’améliorer la qualité de l’éducation.
Les acteurs de la société civile, tels que ceux faisant partie d’ECOZI, représentent diverses voix au sein de la communauté, y compris des groupes marginalisés tels que les femmes, les enfants et les personnes en situation de handicap. En prenant part à la planification et la gestion, nous pouvons plaider en faveur de politiques inclusives qui répondent à leurs besoins spécifiques, en veillant à ce que l’éducation soit accessible à tous les individus, quel que soit leur profil.
Que risque-t-on si la société civile ne fait pas partie du processus de planification pour les jeunes d’aujourd’hui ?
La société civile joue un rôle essentiel dans le développement et l’épanouissement des jeunes. Si les OSC ne sont pas impliquées dans les processus de planification et de gestion de l’éducation, les risques peuvent inclure le sacrifice d’une génération dans le cas où les OSC ne peuvent pas aider à définir un programme pertinent pour le 21è siècle ; la discrimination et l’exclusion en raison du handicap, des stéréotypes de genre, ou de la religion et la culture ; ainsi que la corruption. En outre, les programmes risquent de ne pas correspondre aux besoins réels de la jeunesse d’aujourd’hui en raison de priorités mal définies.
Comment le cours de l’IIPE vous a-t-il aidé à mieux vous engager pour contribuer à façonner l’avenir de l’éducation par la planification ?
Le cours de l’IIPE sur les bases de la planification de l’éducation a renforcé ma capacité d’engagement auprès des décideurs en utilisant toutes les opportunités possibles. Il aide à mieux exploiter les données, promouvoir l’amélioration continue, encourager la collaboration et permet aux membres d’ECOZI d’aborder collectivement les tendances et les défis émergents dans le domaine de l’éducation.
ECOZI compte cinq comités thématiques : Genre et inclusion, Éducation transformatrice de qualité et tout au long de la vie, Alphabétisation fondamentale, Éducation dans les situations d’urgence et Financement de l’éducation. Ces comités défendent un domaine d’action spécifique dans le cadre du plan stratégique du secteur de l’éducation afin de garantir le respect du droit à l’éducation. J’ai intégré les notions de plusieurs modules pour m’assurer qu’aucune communauté marginalisée n’était laissée pour compte.
Par exemple, le module sur la formulation de stratégies pour soutenir les priorités de la société civile a été révélateur pour comprendre comment utiliser des stratégies locales et innovantes pour s’assurer que les stratégies des OSC sont entendues. Dans le contexte zimbabwéen, les médias jouent un rôle essentiel dans le plaidoyer, d’où l’importance d’être innovant pour faire progresser le droit à l’éducation.
Dans le module sur la formulation d’arguments clés pour défendre les domaines thématiques dans le processus de planification, le principal enseignement que j’ai retenu est de veiller à ce que la voix des comités thématiques soit entendue.
Alors que les comités thématiques se réunissent et interagissent dans leur groupe WhatsApp, nous avons constaté la nécessité pour chaque organisation de partager son travail, et lorsque des efforts de collaboration sont nécessaires, d’autres acteurs se joignent alors à elles. Par exemple, le Forum for African Women Educationalists Zimbabwe Chapter (FAWEZI) plaide en faveur du droit à l’éducation, en mettant l’accent sur les jeunes filles. En tant qu’ECOZI, nous invitons d’autres organisations à s’inspirer du modèle de théâtre pour le développement qu’elles utilisent, appelé Tuseme, ce qui signifie « Laissez-nous nous exprimer » en swahili.
Avez-vous appliqué les informations du cours à votre travail professionnel avec la Coalition de l’éducation ? Si oui, comment et quel a été le résultat ?
J’ai progressivement mis en œuvre ce que nous avons appris pendant le cours. Par exemple, nous privilégions la consultation de nos membres pour comprendre leurs priorités et nous nous assurons que le travail de nos partenaires s’aligne avec le mandat du gouvernement.
Chez ECOZI, nous sommes allés plus loin en invitant le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire à partager les problèmes qu’il rencontre et ses projets actuels avec nos membres. Cela nous permet de nous assurer que les programmes des OSC apportent une valeur ajoutée aux objectifs du ministère. Cela aide également les OSC à comprendre ce qu’elles peuvent contrôler dans leurs domaines d’activité, ce qui renforce la redevabilité en matière de droit à l’éducation.
Cet article a été publié à l'origine sur le site web du IIEP, lire l'article original ici.