Développer l’éducation inclusive: donner une visibilité aux enfants vivant avec un handicap au Togo, au Lesotho et au Vietnam

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Clara Lindhard Neltoft
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Workshops for families of children with disabilities
La CNT/EPT au Togo organise des ateliers pour les familles d'enfants handicapés afin de les sensibiliser et de changer leur mentalité.
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Malgré l’attention croissante à échelle mondiale accordée à l’éducation inclusive, les enfants vivant avec un handicap sont encore souvent laissés pour compte. Découvrez comment les coalitions nationales pour l’éducation au Togo, au Lesotho et au Vietnam s’efforcent d’agir en sorte que les enfants vivant avec un handicap soient inclus dans les politiques et les actions en faveur de l’éducation.

COALITIONS NATIONALES POUR L'EDUCATION

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Togo: La Coalition nationale togolaise pour l’éducation pour tous (CNT-EPT) est un réseau d’organisations et de particuliers qui travaillent pour assurer des conditions nécessaires à l’accès de tous les enfants du Togo à une éducation de qualité. Francophones peuvent visionner cette vidéo en Français publiée par CNT/EPT sur la Journée Mondiale de l’Education à Kara.

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Lesotho: Le Conseil des organisations non gouvernementales du Lesotho(LCN) est une organisation mère de 140 ONG au Lesotho, dont la Fédération nationale des organisations des personnes vivant avec un handicap du Lesotho qui travaille sur le handicap et l’éducation.

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Vietnam: L’Association vietnamienne pour l’éducation pour tous (VAEFA) est une coalition d’organisations non gouvernementales, de la société civile et des particuliers qui défendent le droit à l’éducation de tous les Vietnamiens, en accordant une grande attention aux groupes marginalisés tels que les personnes handicapées, les femmes, les minorités ethniques et les enfants, les jeunes et les adultes des groupes vulnérables.

Environ 15% de la population mondiale vit avec un handicap. En matière d’éducation, les enfants vivant avec un handicap sont particulièrement défavorisés. Ils sont à la fois moins susceptibles d’aller à l’école et exposés à un risque plus élevé d’abandon scolaire. Malgré l’attention maintenant plus globale sur les droits des enfants à accéder à une éducation de qualité, les enfants vivant avec un handicap sont souvent laissés pour compte dans l’action mondial visant à améliorer les opportunités pour l’éducation.

Les coalitions nationales pour l’éducation au Togo, au Lesotho et au Vietnam, soutenues par Education à Voix Haute, emploient des approches intéressantes dans leur travail pour garantir les droits des enfants vivant avec un handicap à accéder à une éducation de qualité.

"En ce qui concerne les enfants vivant avec un handicap, nous en sommes encore au point d’assurer l’accès à l’éducation, tandis que pour d’autres groupes, il s’agit maintenant de la qualité de l’éducation – et pas seulement de l’accès", déclare Nkhasi Sefuthi, Directeur général de la Fédération Nationale des Organisations des personnes vivant avec un Handicap du Lesotho (LNFOD), membre de la Coalition nationale pour l’éducation au Lesotho.

Donner une visibilité aux enfants vivant avec un handicap

"Les personnes vivant avec un handicap sont souvent inexistantes des données et statistiques des ministères chargés de l’éducation et de la formation. Ceci, et leur exclusion de la vie sociale, les rend très vulnérables. Pour résoudre ces problèmes, il est essentiel de sensibiliser les parents aux droits des enfants vivant avec un handicap d’accéder à l’éducation et à l’emploi. Mais il est tout aussi important de sensibiliser les pouvoirs publics sur la nécessité de réfléchir à la dimension de l’éducation inclusive dans leurs budgets, leurs projets éducatifs et leur planification", déclare Marcel Toï, coordinateur national du CNT/EPT, la Coalition nationale pour l’éducation au Togo.

Au Togo, le CNT/EPT organise des ateliers à l’intention des parents d’enfants vivant avec un handicap et déploie des outils nationaux de suivi que les enseignants et les formateurs des écoles normales peuvent utiliser pour évaluer le niveau d’inclusion des enfants vivant avec un handicap dans les écoles.

Le handicap et l’éducation sont des priorités absolues de l’Association vietnamienne pour l’éducation pour tous (VAEFA). La coalition travaille en étroite collaboration avec la communauté sourde et les décideurs politiques, et a réussi à combler les lacunes et à améliorer la coopération entre les deux groupes:

"La communauté des sourds au Vietnam était auparavant exclue de l’influence politique et avait renoncé à coopérer avec les décideurs politiques. Nous devions créer un pont entre eux, organiser des ateliers et établir des relations pour nous assurer que la communauté sourde dispose de l’espace nécessaire pour s’engager et articuler ses recommandations dans les processus d’élaboration des politiques", déclare Nguyen Thi Kim Anh, coordinateur national de VAEFA.

Au Vietnam, les personnes sourdes font partie des groupes les plus marginalisés et de nombreux enfants sourds ne sont jamais inscrits à l’école.

"Beaucoup de parents ne pensent pas que leurs enfants sourds peuvent apprendre", dit Kim Anh Nguyen.

Pour y remédier, VAEFA a, avec le soutien d’Education à Voix Haute, réalisé des événements et des initiatives stratégiques entièrement organisés par la communauté sourde. Ces actions de plaidoyer ont permis de sensibiliser, de mettre l’éducation inclusive à l’ordre du jour politique et d’accroître la compréhension parmi les parents des besoins et des droits de leurs enfants.

Capacités manquantes

Certains des principaux problèmes rencontrés par les coalitions sont le manque de capacités dans les écoles et de connaissances parmi les enseignants pour répondre aux besoins des enfants vivant avec un handicap et de leurs différents besoins:

"Lorsqu’il s’agit d’éducation, les écoles ne leur sont pas physiquement accessibles. Au Lesotho, seulement 5 écoles dans l’ensemble du pays peuvent assurer le soutien nécessaire aux enfants malentendants ou malvoyants" explique Nkhasi Sefuthi de LNFOD au Lesotho.

Ateliers pour les parents au Togo

"Nous organisons continuellement des formations et des ateliers pour les parents d’enfants vivant avec un handicap. Nous pouvons voir que les mentalités des parents changent. En ce qui concerne le handicap, changer les mentalités des gens est la partie la plus difficile. Nous créons un dialogue avec les parents et leur parlons de l’importance de la scolarisation pour les enfants vivant avec un handicap. Mais aussi les former de manière à soutenir leurs enfants"

- Marcel Toï de CNT/EPT au Togo

Au Togo, au Lesotho et auVietnam, les enseignants ne sont souvent pas suffisamment formés pour comprendre les différents types de handicaps. En raison de cette lacune dans la formation, les coalitions nationales de l’éducation s’engagent directement dans la formation des enseignants pour les outiller afin de répondre aux besoins des enfants vivant avec un handicap.

Le manque d’éducation dérobe les enfants vivant avec un handicap de leur avenir

Du fait qu’ils n’ont pas accès à une éducation de qualité, les enfants vivant avec un handicap sont par la suite exclus en matière d’emploi plus tard dans la vie. Pour y remédier, CNT/EPT au Togo a réussi à s’engager dans le secteur de l’éducation informelle:

"Tous ces enfants qui ne pouvaient pas être intégrés dans le système éducatif normal ont été laissés de l’écart – la plupart du temps pendant de nombreuses années. C’est pourquoi nous coopérons avec le secteur de l’éducation informelle pour créer des opportunités pour les enfants vivant avec un handicap et nous assurer qu’ils sont pris en compte dans les budgets et les programmes pour l’éducation", déclare Marcel Toï, coordinateur national de CNT/EPT.

La production de films au Vietnam

Avec le soutien financier d’Education à Voix Haute, VAEFA a récemment produit le court métrage « Where I belong » portant sur l’intersection entre le handicap et le genre. Le film a été produit en collaboration avec la communauté sourde et toute l’équipe était constituée de personnes sourdes à l’exception du caméraman et du réalisateur, ce dernier étant un interprète en langue des signes.

Les actrices et acteurs principaux sont quelques-uns des étudiants sourds qui ont été soutenus par VAEFA dans leurs études pour devenir enseignants. VAEFA a récemment célébré la remise des diplômes de 8 nouveaux enseignants sourds. Auparavant, seulement 32 personnes sourdes sur 1-2 millions au Vietnam avaient obtenu leur diplôme universitaire. VAEFA va bientôt présenter le film en avant-première au cours d’un grand festival. Ils espèrent que le film sensibilisera le public et les décideurs politiques et occasionnera des politiques, des programmes et un financement de l’éducation inclusive pour les personnes handicapées au Vietnam.

Découvrez la bande-annonce ici.

Attirer l’attention des décideurs politiques

Les gouvernements du Lesotho et du Vietnam ont récemment adopté une nouvelle législation garantissant les droits des enfants vivant avec un handicap. La loi sur l’éducation inclusive au Lesotho est le résultat d’efforts déterminés de la part d’organisations de la société civile travaillant ensemble pour faire pression sur le gouvernement. Dans le contexte du Lesotho, cette loi est la première de toutes à garantir les droits à l’éducation inclusive spécifiquement pour les enfants vivant avec un handicap:

"La loi a garantis des droits aux enfants vivant avec un handicap en vertu de loi exécutoire. Les particuliers ainsi que la société civile peuvent désormais revendiquer ces droits. Il renforce le pouvoir du peuple de protéger le droit à l’éducation des enfants vivant avec un handicap et de demander des comptes aux décideurs politiques", explique Nkhasi Sefuthi, coordinateur national du LNFOD au Lesotho.

Pour VAEFA au Vietnam, ce fut une victoire lorsqu’une loi révisée sur l’éducation a été adoptée en 2019:

"La loi révisée sur l’éducation comportait une clause stipulant que les personnes appartenant à des minorités ethniques peuvent apprendre dans leur propre langue. Mais nous avons fait adopter une clause stipulant que les aveugles et les sourds ont également le droit d’apprendre par le à travers leurs langues. La langue des signes et le braille sont les langues dans lesquelles ils se sentent à l’aise d’apprendre", explique Kim Anh Nguyen.

Les trois coalitions nationales pour l’éducation notent des changements positifs dans les mentalités des décideurs politiques. En mettant de plus en plus l’accent sur les droits des personnes vivant avec un handicap, la société civile joue un rôle aujourd’hui plus crucial que jamais dans la sensibilisation de l’opinion et veiller à ce que la mise en œuvre de nouvelles politiques se réalise dans la pratique:

"Parfois, le gouvernement oublie que le rôle de la société civile est d’être la voix des sans-voix. Nous voulons une infrastructure accessible à tous. Nous devons donc leur demander des comptes. En tant que société civile, nous continuerons de frapper aux portes et d’insister sur ce qui doit être changé et mis en œuvre", déclare Sebabatso Ntlamelle, coordinateur de la Commission de la santé et du développement social du Conseil des ONG du Lesotho.

HANDICAP ET ÉDUCATION

Selon une étude menée dans 19 pays en développement par la Banque Mondiale et le Partenariat Mondial pour l’Education (PME), 30 % des enfants vivants avec un handicap n’ont jamais été scolarisés (Banque mondiale 2017).

Les écarts entre les enfants vivants avec un handicap et les enfants non handicapés se sont considérablement creusés au cours des dernières décennies et les enfants vivants avec un handicap ont été largement exclus des actions visant à améliorer les résultats scolaires dans les pays en développement (Banque mondiale 2017).

L’accès des enfants vivant avec un handicap à l’école est souvent limité par un manque de compréhension de leurs besoins et un manque d’enseignants formés, de soutien en classe, de ressources d’apprentissage et d’installations (GPE 2021).